PROTÉINE, C’EST MA COUSINE…

L’innocence de la langue Pasolinienne. Son innocence primordiale, sauvage, enfantine et cruelle.
Ouvrir le livre convoque la lumière et les parfums d’une vieille ferme frioulane. On entend les cigales.
Pendant ce temps là, il y a un petit bonhomme, en haut à gauche, qui fait la gueule en disant « HTTP » error mais je n’en crois rien.
Je serais bien resté encore trois semaines dans les Cévennes, chez P.G., sans électricité, dans la montagne, à des kilomètres du premier village. Séjour antique, apaisant. Prendre la voiture est une aventure. Il y a un virage en épingle à cheveux vertigineux et il faut rouler dans le chaos d’un chemin sans maître. Une réelle déconnexion et l’espace d’une pensée plus ample. P. fait des rêves bilans. Je ne me souviens pas des miens. Si j’avais pu rester encore et vraiment me mettre au travail (j’avais apporté une guitare, achetée à TM quelques jours plus tôt), j’en aurais sans doute fait de fameux. Il aurait fallu pouvoir renvoyer les enfants vers leurs jeux et rester à s’amuser entre adultes. Il fallait, cependant – principe de réalité – redescendre vers les plaines électrifiées et la métropole étouffée.
Du coup, pour m’alléger, j’ai entamé un régime drastique et ne mange quasiment plus que des protéines, avec des légumes un jour sur deux.
Ivresse de l’ascèse.
C’était un drôle d’exercice, hier soir, de dîner avec les A., en ne prenant, en tout et pour tout qu’un demi-verre de vin et une lamelle minuscule de fromage.
Pas désagréable, du moment qu’on sait que la privation n’est pas éternelle.
Éprouver le désir, le manque et la satisfaction de l’effort récompensé (entre trois et quatre kilos perdus cette semaine), c’est un peu vulgaire mais c’est bien agréable.
Et puis, piscine tous les jours cette semaine avec C. qui prend des leçons de natation.
Et encore, pour faire bonne mesure, club de gym deux fois (c’était fermé aujourd’hui malheureusement). Ne pas lésiner avec l’extase de l’effort.
Le mouvement est amorcé. C’est la bombe humaine.
Vu « Rester Vertical » d’Alain Guiraudie, avec Y. avant-hier. Merveilleusement libre et précis.
En ayant grosso-modo fini avec le livret de communication de l’école d’art, je me suis remis à réfléchir à Hong Sang-soo, à cette thèse commencée, suspendue. J’ai jusqu’au quinze septembre pour faire part de mes intentions auprès de l’école doctorale. Passé ce délai, il sera trop tard. 

Que de soucis flottants ! que de confus nuages
présentent à mes yeux d’inconstantes images !
Douce tranquillité que je n’ose espérer,
Que ton divin rayon tarde à les éclairer !

En attendant, je télécharge « Un jour avec, un jour sans ».

VACANCES INTERMINABLES

Il y a le fait d’être techniquement en vacances depuis plus d’un mois et la permanence de cet état de vacances qui n’est qu’une mise à distance du travail épuisante.
Hâte que ces vacances prennent fin.
Mais quel bonheur que ces vacances.
Vacances interminables.
Mais il y a surtout la réalité de la durée de cette vacance.
Comme on dit d’une vacance du pouvoir.
Vacance de huit ans, vacance de dix ans.
La question n’est pas: « pourquoi n’a-t-il rien fait pendant ces dix ans ? », c’est la question de l’anecdote, mais « pourquoi s’est-il soudain remis au travail après dix ans de vacance ? ». C’est la question du sens.
Pourquoi se remettre au travail ?
Parce que le devoir nous y appelle, les amis.
Sans appel, point d’urgence.
L’appel résonne. Il y a appel.
De Narbonne à Issoire, d’Issoire à Flavigny, de Flavigny à St Amand Montrond et bientôt à Nîmes, Alès et St Jean du Gard, je fais résonner l’appel et des voix me répondent.
C’est encourageant.
Il me faut trouver deux ou trois cent âmes bien nées.
Hommes et femmes de bonne volonté.
C’est en cours. Cela se produit.
Les vacances prennent fin.

AUVERGNE

Pas de réseau. Pas d’Internet. Je dicte ce texte à mon téléphone. Les mouches bourdonnent. C’est curieux. Curieux de ne pas taper, de dicter, de corriger quelques fautes. Pas du tout le même genre de rythme ni le même style, comme quoi le style c’est aussi l’outil. La voix c’est un autre outil. Avec d’autres contraintes, une autre forme d’extériorisation. Ce faisant, je remarque que l’application LiveJournal pour le téléphone est vraisemblablement d’origine russe. Comment m’expliquer sinon que tous les menus m’apparaissent en caractères cyrilliques ? 

C’est étrange. Je dois corriger, je dois revenir sur ce que je viens d’enregistrer. Mais pas du tout comme je le ferais pour quelque chose d’écrit.

Ce ne sont pas les mêmes corrections, les mêmes repentirs.

Je n’ai pas encore expérimenté les cas où le fait d’écrire se révèlerait plus fastidieux que d’enregistrer. En réalité, pour l’instant, enregistrer se révèle plus fastidieux que de taper à la main.

J’ajouterais même que ça n’a pas beaucoup d’intérêt. Pas beaucoup d’intérêt d’en parler. C’est un peu sans intérêt. C’est un peu nul. Désolé.

Peut-être qu’à force… Il faut peut-être persévérer ? Il faut peut-être essayer ? Peut-être encore tenter ? Peut-être ? Je ne sais pas. C’est un peu embarrassant…