EUROVISIONS

Parce que, paraît-il, c’est ce soir et que, de toute évidence, nous ne regarderons pas. Au lieu de cela, nous nous sommes réveillés autour de huit heures et j’ai eu la joie de constater que l’écran de mon ordinateur portable n’était pas fendu en deux et cintré mais bel et bien intact.
Dans mon rêve, un vandale avait détruit le portable et je devais en acheter un autre, sauf que les prix des machines avaient terriblement augmenté et qu’un portable coûtait désormais la modique somme de trente mille euros.

Bref, S. hurlait « Papa! Papa! », alors je hurle: « S…! S…! », alors il hurle: « Viens ! Viens! », alors je hurle: « Non, toi, viens! », alors il hurle: « Non, toi! », alors je hurle: « Dans cinq minutes! », alors il hurle: « Non, maintenant! », alors je hurle: « Non, maintenant, je fais la grasse matinée ! Dans cinq minutes! », alors il hurle…etc.

Au bout d’un moment, je le rejoins et lui explique que ce n’est pas une bonne manière de commencer la journée, que ça met une pression inutile, que cela crée une tension, qu’il n’est pas handicapé, qu’il a des jambes, qu’il peut se lever et venir de lui-même me rejoindre, qu’il n’a pas besoin que je vienne le chercher, que personne n’aime obéir à des ordres, etc.

Il n’en croît rien.

Alors au bout d’un moment l’on se bat et l’on se fait des chatouilles. Mais, au bout d’un moment, il commence à donner des coups de pieds, alors, au bout d’un moment, je lui dis que ce n’est pas possible et que je vais aller me faire un café, alors, au bout d’un moment, il me dit qu’il arrête, mais, au bout d’un moment, il recommence, alors, au bout d’un moment, je me lève et je vais me préparer un café.

Je mélange la fin du café italien, que j’aime bien, avec un peu du café sud-américain, que je n’aime pas et ça donne un café que je n’aime qu’à moitié, mais j’aime encore moins gâcher du café en jetant celui que je n’aime pas.
Je me demande si c’est une philosophie de vie valable. Je réfléchis à ça en faisant griller une tartine, que je mange avec du beurre et du jambon.
Et puis j’ai encore faim, alors j’en prépare une autre. Et puis je mange encore un yoghourt aux mangues avec deux cuillerées de psyllium blond et je bois un café.
Et puis j’écoute la radio. Et c’est l’émission de Finkielkraut. Et il y est question des dégâts que provoque, sur le système cérébral d’un enfant, l’exposition aux écrans. C’est terrible. Ça fait des ravages. Ça fait froid dans le dos.
Et il y est encore question de la complicité des géants de la technologie avec les idéologies d’extrême droite. Et il y est aussi question du danger né de la confiscation de l’éducation par ces idéologues d’extrême droite technologiques.
Et puis je me dis que ça fait un petit moment que je n’entends plus S. hurler. Ni même parler. Ni même bouger. Je me demande s’il s’est rendormi.
Mais non. Il est assis dans son lit et attend que je vienne le chercher. Il me dit qu’il ne bougera pas tant que je ne viens pas le chercher.
Qu’il ne se lèvera plus jamais, tant que je ne viens pas le chercher.
Et je lui dis que ça tombe bien alors, puisque justement je suis venu le chercher.
Alors je le prends dans mes bras mais il me dit qu’il veut aller chercher son Guy. Je lui dit que j’irais chercher son Guy plus tard. Mais il me dit qu’il va aller le chercher lui-même. Et il va le chercher.

Et puis je lui demande ce qu’il veut manger.
« Rien », il me dit.
Je lui demande s’il veut manger un œuf dur avec de la mayonnaise.
Il me dit « oui ».
« Avec une lichette de cheddar », il me dit.
Je lui dit qu’il n’y a pas de cheddar mais qu’il y a du camembert. Alors il est d’accord pour du camembert. Il a rêvé de hot-dogs et voudrait en manger à midi mais pour midi j’ai prévu des travers de porc caramélisés alors nous nous mettons d’accord pour prendre des hot-dogs au goûter.

On regarde la fin de Tarzan, le dessin animé de Walt Disney de 1999 et S. n’est pas content parce que ça ne se finit pas comme il pensait que ça devait se finir. Je lui dis qu’il avait dû voir la deuxième partie ou bien une autre version.
Je ne sais pas trop ce qui le dérangeait à la fin, parce que je me suis levé pour répondre à ma mère, avec qui il faut hurler au téléphone parce qu’elle n’entend pas grand-chose. Alors je m’éloigne, pour éviter de déranger S. avec mes hurlements et aussi parce que tout bruit environnant est susceptible de déranger ma mère. Elle me dit qu’il y a toujours comme un grésillement autour de moi. Alors qu’il n’y a rien et que la réception est parfaite. « Il n’y a qu’avec toi que ça me fait ça », me dit-elle toujours. Comme un fait exprès. Et puis, bon, on discute, on discute et entretemps le film se termine. Donc la fin, qui dérange tellement S., m’a échappé.

Ensuite S. veut peindre. C’est très bien, je lui installe une table de peinture dans sa chambre pendant que je prépare la cuisine. C’est idéal. On peut chacun se concentrer sur ce qu’on a à faire. Lui, de la peinture, moi, de la cuisine. C’est comme ça que c’est le mieux. Quand chacun est concentré sur ce qu’il a à faire.

Alors que je viens de mettre les travers de porc à cuire, R. rentre. On déjeune tous les trois et S. exprime le désir d’aller voir des squelettes à la galerie de paléontologie du Jardin des Plantes. Alors R. réserve des places et on y va après avoir déjeuné. J’ai tout de même le temps de faire un peu de gym et de prendre une douche. On n’est pas aux pièces.

La Gare d’Austerlitz est toujours en travaux.
J’ai toujours connu la gare d’Austerlitz en travaux.
Il y a 35 ans, quand j’y habitais, elle était déjà en travaux et cela n’a pas cessé depuis.
En fait tout le quartier compris entre le pont d’Austerlitz et le boulevard Saint-Marcel est perpétuellement en travaux depuis plus de 30 ans.
Ça ne s’arrête pas. C’est comme une malédiction. Comme un trou dans l’espace-temps.
Il faudrait faire un film là-dessus.

Donc nous traversons les chantiers, les ruines, les démolitions, pour aller du métro au musée. On s’attarde maintenant davantage au rez-de-chaussée.
Pour les serpents.
Il y a une tête de crotale Cascabelle dans du formol. Et un fer-de-lance entier, juste à côté.

J’ai mis un masque, à cause du pollen et je reste sur un banc à l’ombre, pendant que R. et S. se baladent au soleil.
Je reste une petite heure à méditer sur le banc, en me disant que je devrais apprendre un mantra, pour au moins méditer correctement.
Au bout d’une heure, j’en ai un peu marre de méditer alors j’appelle R. pour dire que je rentre, que je suis fatigué, que ma batterie est à plat et que je les attends à la maison.
Puis je rentre.
À 17h50 j’arrive à la maison.
Je me fais un café, j’accroche le linge au sèche-linge et je regarde le 18ème et dernier épisode de la 3ème saison de Twin Peaks. Je ne me souvenais pas du tout que ça se terminait comme ça. Et d’ailleurs, ça ne se termine pas. C’est exactement ce qu’il fallait.

EN EXTÉRIEUR

Ce matin, R. m’a mis dehors.
C’est-à-dire qu’elle m’a donné ma journée.
– Sors, va te balader, va voir un film, rentre tard.
Alors je suis sorti. Je suis allé à mon rendez-vous de 10h30 avec K. à la Tour-Maubourg, où nous prenons un café en attendant A.B., avec qui nous devons visiter un local pour y installer un studio.

Visite faite, le local est très bien et le projet est excitant. On discute un petit moment, on fait des plans, on prévoit de se revoir mardi prochain et il faut que je rencontre l’architecte. C’est très bien, très bien.
Ensuite, je raccompagne K. jusqu’au métro Invalides et je continue à pied jusqu’à Maubert-Mutualité. Je passe rue Jean de Beauvais et je constate que mon ancien club de gym est de nouveau un club de gym mais que maintenant ça s’appelle Keep cool et que ça appartient apparemment à un groupe qui possède tout un tas de clubs de gym dans la région parisienne.

Je mange un bo-bun au petit restaurant vietnamien du bas des marches, où je mangeais très souvent lorsque je venais quotidiennement dans le quartier. Rien ne bouge. Ni la boulangerie, avec ses serveuses russes, ni le cours de français, en face des restaurants japonais, ni l’opticien où j’avais acheté l’extraordinaire paire de Ray-Ban, que j’ai par la suite bêtement perdue dans l’océan Pacifique, lorsque nous étions allés rendre visite à C. et A. à Hong Kong et dont je n’ai jamais pu retrouver un autre exemplaire depuis. Ce quartier ne bouge pas. Pas une boutique, pas un restau. Les gens sont les mêmes. Incroyable.

Ensuite je vais à pied rue Greneta, dans l’espace de coworking où je reste à travailler environ deux heures et demie sur le montage et le mixage des voix enregistrées lundi, avant de les envoyer à S. et L.

Puis, je me dis que j’irais bien voir le Cronenberg qui commence à 16h45 et je remonte la rue Montorgueil. En arrivant au niveau de Saint Eustache, je tombe sur S.G. qui arrive dans le sens inverse à vélo. On va boire un café et on papote mais il faut que j’abrège, parce que je suis déjà en retard pour le film. On se promet de se voir avant notre départ d’Aubervilliers et je fonce vers l’UGC.

Le film est commencé depuis huit minutes mais ce n’est pas très grave. C’est un Cronenberg du genre théorique. Pas très immersif. Qui tient à distance. Le jeu de Vincent Cassel a du mal à prendre. Un peu comme avec De Niro. On regarde le travail de l’acteur et on n’est pas avec le personnage. Ça tient sur la chimie des corps. Ça tient à peu de chose mais cela finit par tenir. Cela finit par consister tout en s’évaporant.

Et puis, il n’est pas tard mais je rentre quand même et j’arrive vers 19h45 à la maison. D., le copain de S. est là. Il sont en train de fabriquer une espèce d’inondation dans sa chambre en versant des seaux d’eau dans un parapluie ouvert. Avec R., on intervient in-extremis. Puis M., la maman de D. passe le chercher. On boit un verre avant qu’ils s’en aille. S. est dans tous ses états. Il faut lui brosser les dents de force. Hurlements, coups de pieds. Ça finit par se calmer et R. va le coucher.

Je travaille un peu sur les plans de Martinique et sur un devis pour le projet de studio de ce matin. Dans le métro, je me disais qu’il faudrait se remettre à écrire des scénarios. Il faudrait s’y remettre, oui.

LE MONDE SANS IMAGES

Façades vierges, abri-bus vierges, absence de panneaux publicitaires. La ville est nue. Les images se sont absentées. Fini les écrans géants, les néons, les bill-boards. Il reste encore quelques rares graffitis. Des affiches, encore, dans le métro. Pour combien de temps ? Même les flancs des trams sont nus.
La ville est nue, les images se sont évaporées.
Elles ont été, peu à peu, entièrement absorbées et régurgitées par les écrans célibataires, dans le circuit de soi-à-soi de parcours somnambules. Interfaces insomniaques et hypnotiques. Images désormais solitaires, sans partage, sans regards, sans analyse dans un déroulement sans fin. Images en circuit court, en circuit fermé.
Je me suis dit qu’il faudrait documenter cela. Il suffirait, m’étais-je dit, de photographier la ville. N’importe quelle photo de n’importe quelle ville pourrait servir à documenter cette disparition progressive des images de l’espace public. Mais aussi, il faudrait voir ce que font apparaître les corps, les postures, les silhouettes, les rares regards interceptés.

J’ai pensé que ce pourrait être un projet uniquement photographique. Ou un film. Je me suis dit qu’il fallait commencer. Alors j’ai commencé. C’était après une journée à recevoir des candidats pour le concours d’entrée en première année de l’école des beaux arts de Nantes et justement, aujourd’hui (mais hier aussi), nous avions reçus d’excellents candidats. Tellement, que c’en était une joie et que me voila joyeux, dans la lumière de l’été, malgré ma vieille fatigue de la veille.

Je n’avais pour ainsi dire rien fait d’autre de la journée, à part manger un sandwich bacon-œuf mimosa au petit déjeuner et du poulet caramélisé croustillant coréen au déjeuner. Rien d’autre à part un trajet en vélo, boire quelques cafés, échanger quelques mots avec I. dans le studio son, pour lui dire qu’il fallait qu’elle ait davantage confiance en elle et en ses projets. Rien d’autre ensuite, à part un trajet en tram et maintenant en train.

Et c’était très bien.

LA SINGULARITÉ DES SENTIMENTS

Ce n’est pas tous les jours facile, me dis-je. C’est le plus souvent laborieux, pénible, rebutant, ennuyeux, me dis-je. C’est le plus souvent un pensum, une corvée, un devoir, une sinécure, me dis-je. Mais enfin, il faut, je me dois, je me dois bien ça. On se doit bien ça, me dis-je, pensais-je.

Et donc, plutôt que de poursuivre tout simplement, plutôt que d’enchaîner les épisodes de cette re-vision de la 3e saison de Twin Peaks, après avoir -enfin- réussit à obtenir de S. qu’il s’endorme (au chapitre XVIII du Petit Prince, ou quelque chose comme ça). J’avais laissé tourner le podcast, j’avais dit: « je vais me laver les dents et je reviens ». Je m’étais lavé les dents, j’avais fait la vaisselle, préparé mes affaires pour demain et puis j’étais allé chercher mon téléphone qui continuait à diffuser le podcast dans la nuit d’un petit garçon qui ronflait doucement. Ouf, me suis-je dit. Enfin !

Lundi, donc. C’avait été un lundi, encore. Un de ces lundis où je me recouche un peu entre 7h45 et 8h00, après le petit déjeuner et avant de commencer vraiment la journée, R. ayant déposé S. à l’école. Ensuite, je n’étais pas très pressé. Juste un rendez-vous à 11h à Objectif Son pour enregistrer une voix.

On s’était dit « il y en a pour une heure à peine » et en fait c’est plus long. C’est plus long parce que c’est institutionnel et que l’institutionnel, si on n’a pas ça dans le sang, il faut chercher l’articulation des concepts. C’est la langue de bois dans la pensée agile et parfois c’est la langue agile dans la pensée de bois. S. revient de Corée, encore toute jet-laguée mais cela lui donne une espèce de sur-régime un peu exalté. L. et S. veulent à tout prix faire les liaisons, toutes les liaisons. Moi, je prétends que toutes les liaisons ne sont pas bonnes à dire. On y passe un temps certain, mais ce n’est pas déplaisant.

Vers 13h30, je rentre après une course à l’épicerie chinoise en bas. Tandis que R. s’en va donner ses cours, je me prépare des pâtes chinoises aux choux de Shanghai et à la poitrine séchée. Un yaourt grec au miel et au sarrasin. Une bière japonaise. Je regarde la fin de Blue Velvet, qui me plait davantage que la dernière fois que je l’ai vu, surtout parce que j’y cherche les détails décrits dans la biographie. De fil en aiguille, je télécharge donc cette dernière saison de Twin Peaks, pas revue depuis 2017 et le premier épisode possède un certain nombre d’atouts.

J’ai aussi fait opposition à ma carte Business, pour signaler une opération frauduleuse et, je l’espère, me faire rembourser. J’ai également interrogé le support technique de mon hébergeur quant à la possibilité d’installer le module PHP Imagick et il m’a été répondu que, pour qu’une telle chose se produise, il faudrait pour le moins que je passe à l’abonnement supérieur (« performance plus » je crois, où quelque chose du genre), alors, pour voir, je leur ai demandé combien il m’en coûterait et j’attends leur réponse, comme j’attends d’ailleurs les propositions de toutes ces sociétés qui me proposent sans trêve des rachats de crédits et me laissent en plan quand il s’agit de passer aux choses sérieuses.

Et puis, vous savez quoi ? Il se fait tard et demain, réveil à 4h00 du matin pour attraper le train de 6h30, donc rideau.

POLLEN, POLLEN, POLLEN

Ce n’est pas parce que la journée est belle, que la joie est grande et notre enthousiasme à son comble que l’on peut impunément se rendre à vélo au Parc Départemental de la Courneuve, se promener et espérer retrouver son vélo au retour tout d’une pièce pour tranquillement repartir.
Nan, nan, nan.
On vous aura au moins crevé un pneu. Pour le moins. Et c’est donc avec le pneu avant crevé que nous sortîmes du parc.
Dignement, mais fatalement.

Tant pis, au fond, ce n’est pas grave et puis c’est l’occasion d’apprendre à changer une chambre à air, me dis-je.
Nous déposâmes le désormais inutile et encombrant vélo chez R.S., heureusement présente chez elle cet après-midi, puis nous rentrâmes par le 150, bondé comme il se doit, mais c’est plutôt une chance car nous n’avions pas nos pass Navigo et qu’un bus bondé comme celui-la est dissuasif aux yeux de n’importe quel commando de contrôleurs.

Avant cela, nous avions déjeuné d’un délicieux pique-nique dans l’herbe sous les arbres.
J’avais mis dans le sac, quatre œufs durs, de la mayonnaise, du jambon, du pain, du cheddar, des minizzas et des framboises.
S. apprécia à leur juste valeur les œufs durs-mayo et les lichettes de cheddar, nouveau concept pour lui.
Puis nous nous mîmes à la recherche de lézards, de tortues et de grenouilles, que jamais nous ne trouvâmes, pour ne rien dire des invisibles serpents.
Nous ne pûmes débusquer rien d’autre que des oies bernaches, des foulques macroules, des poules d’eau, des canards, des hérons et quelques gendarmes isolés.
Ah, si, un ou deux petits lapins en embuscade.

Mais ce que nous trouvâmes en abondance, c’est du pollen. Ah, que de pollen! Une neige de pollen. Une tempête de pollen. Un ouragan de pollen. Mes yeux virèrent au rouge, le nez se mit à couler, la gorge à brûler, les oreilles à s’enflammer. Et à l’heure qu’il est, je me dis que dès que j’aurais fini d’écrire cette phrase, ou en tout cas ce post, j’avalerai sans faute un cachet d’antihistaminique, parce que tel est mon destin.

BIG BROTHER IS WATCHING

Et voilà qu’il devient nécessaire de faire établir mes factures par mon comptable en ligne, qui se charge de les transmettre au fisc et au client. L’auto-surveillance marque des points tous les jours. Le truc pratique c’est qu’il suffit de scanner toutes les factures pour que le logiciel de comptabilité les mette automatiquement en relation avec les opérations enregistrées sur le compte. De bien belles journées au scanner en perspective!

On dirait que le froid s’éloigne. Progressivement. Il ne fait toujours pas chaud, au point que le chauffage s’est remis en route, ai-je remarqué. Mais fi de tout cela, l’été arrive bel et bien à grands pas.

Il fallait aller chercher un panier de légumes à l’AMAP, dans une armoire fermée par un cadenas, dont je possède le code, au beau milieu du marché de Montfort, qui est un tout petit marché. Alors que je remplis mon panier, un homme m’interpelle.

-Vous êtes de l’association « Robins des pois » ? – me demande-t-il, je suis M. X, adjoint au Maire.

Il me demande si tout va bien. Pas de problème de vols ? Tout est bien sécurisé ? Je dis qu’apparemment oui, mais je ne suis peut-être pas au courant ? Il y a peut-être des problèmes dont je n’ai pas connaissance ? Je me demande s’il y a des problèmes dont je n’aurais pas entendu parler. Il salue, s’éloigne. Je remets prudemment le cadenas en place. Sensation d’insécurité soudain.

Et puisque la voiture me fait des alertes à la pression des pneus, je vais vérifier la pression des pneus et, comme d’habitude, tout va bien, ils sont à bloc, ponctuels. J’en profite pour passer l’aspirateur, vider les détritus dans une poubelle, lessiver les jantes, la carrosserie, les vitres, rincer, ça brille, c’est beau. C’est beau, une voiture qui brille. Alors je vais faire les courses chez Auchan et j’admire la voiture qui brille sur le parking. C’est moi qui ait la voiture qui brille le plus de tout le parking. Et ouais…

Ensuite, tout va très vite, c’est l’escalade. Je rentre, un risotto aux asperges, je range, je nettoie, je fais des lessives et, ensuite, je dessine des plans pour le studio à la Martinique jusqu’à ce qu’il soit l’heure d’aller chercher S. En rentrant, je continue à dessiner un peu. On regarde des films. R. rentre. S. tape une crise et envoie ses spaghettis sur le tapis. Il faut se fâcher tout rouge. Il est fatigué. On regarde un documentaire sur les crocodiles marins, puis sur les anacondas vert. Et c’est l’heure de se laver les dents et au pieux les petits vieux. Le Petit Prince jusqu’au baobabs puis deux podcast (un sur les suricates, un sur le corail et hop, zou, zzzzz).

POST REALITUM ANIMA TRISTE

Malgré toutes sortes d’armistices, ç’avait été une journée mobile somme toute. Une journée à 15286 pas, si j’en crois le podomètre intégré.
Pourtant tout avait commencé par une matinée casanière, à regarder des documentaires animaliers apocalyptiques avec S., pendant que R. était sortie corriger des copies au café.
Vers midi, j’avais préparé une omelette et des pommes de terre sautées pour S., frichti auquel j’ai, tout de même, un peu goûté, malgré mon serment de jeûne intermittent, puisque ce soir je dinais avec C.

J’ai l’impression d’être Don Patillo dans une publicité pour Panzani.

Et ensuite, nous étions partis vers le Jardin des Plantes et plus précisément vers la ménagerie. Et plus précisément vers le vivarium. Et plus précisément vers la cage du Monstre de Gila, qu’on attendit en vain. Il se terrait au fond de son trou, ne laissant voir qu’une sombre silhouette de soixante centimètres de long.

L’on admira le panda roux et ses voisins velus dont j’oublie le nom. L’on salua sangliers et porc-épics. L’on chercha en vain les grenouille dans les divers bassins mais l’on ne pu trouver que carpes et têtards. L’on bailla aux corneilles et les corneilles nous croassèrent aux oreilles. A un certain moment, je perdis de vue R. et S. et me dirigeai vers la sortie.

Je marchai jusqu’à la rue Rambuteau, en prenant par le quai St Bernard.
Là, c’est étrange, des alcôves en demi-cirques sont aménagés face à la Seine, tout le long du quai.
Dans chaque alcôve est diffusé de la musique et des gens dansent ou jouent des percussions. Curieusement, l’on passe d’une bande son à l’autre sans empiètement. Chaque alcôve semble comme isolée des autres.
J’étais d’abord épuisé, écrasé de fatigue, surtout avec mon sac à dos, puis, à force de marcher et d’avancer, j’étais de moins en moins épuisé. Mais, bon, j’étais tout de même un peu fatigué en arrivant sur la rue de Rivoli et je fis une pause pour une verre de Viognier à La Tartine.
Je repensai, bien sûr, à toutes ces tartines de crottin de chèvre sur pain de Poilâne, accompagnées d’un verre de Sancerre blanc, que l’on mangeait les dimanches midi avec C.S. et ses parents, dans les années 80. Aux délices aux raisins, que l’on allait chercher dans la boulangerie à l’arrière, devenue maintenant un kebab.

Et j’étais ensuite aller boire un verre de Sancerre, justement, au café La Station Rambuteau, en attendant C. puis nous étions allé manger des hamburgers au Ruisseau.
Nous étions ensuite allé chercher pour elle un milk-shake caramel un peu plus loin, qu’elle avait bu en marchant, tandis que nous faisions un petit tour du quartier.
Puis, voyant qu’il était 20h15, je m’étais dit qu’il était encore temps d’attraper une séance de The Thunderbolts au Ciné Cité les Halles et, oui, il était encore temps et c’est donc ce que je fis, ayant quitté C. au croisement Rambuteau – Beaubourg.

Et donc je me disais, en quittant la salle, que c’était bien là un film de la post-réalité, comme je lisais justement qu’un pape américain venait d’être désigné par le conclave. Ce pape américain, c’est un peu, pour Donald Trump, ce que les Thunderbolts sont pour Valentina de Fontaine, m’étais-je dit en montant dans le métro. Et c’était plutôt une bonne nouvelle, avais-je pensé.

SOUDAIN IL EST TEMPS DE RENTRER

Comme à Séoul les matins, l’après-midi fut calme, après une matinée animée. Animée mais pas laborieuse. Voir quatre étudiants de première année de Master, ce n’est pas une épreuve insurmontable.

Ensuite, petite réunion dans la cuisine. C’est G.N. qui nous régale d’une salade lentille-riz sauvage, gaspacho et œufs sur le plat. On déjeune avec M.D. et C.R. Après avoir longuement discuté des événements de la matinée, on s’entretient des différentes problématiques pédagogiques et/ou administratives et l’on se dit que ce serait une bonne idée de préparer un peu les réunions de fin d’année, par exemple en soumettant quelques points à l’ordre du jour.

Il y a des cochons dans cette école: de la vaisselle sale et des contenus moisis semblent traîner ici depuis des semaines. Peut-être des mois ? C’est assez répugnant. Trop sale pour être simplement agrégé à notre vaisselle.

Ensuite, café chez Askip, puis rendez-vous vidéo avec S.B. et lapin de W.M. Un peu d’assistance son à des étudiantes de L3 puis zou, on va boire un verre avec M.G. et C.M.

SON NOM DE LA NIEVRE DANS HIROSHIMA DÉSOLÉ

Tout de même, me dis-je, ça tient sacrément la route Hiroshima mon amour. Ça passe les portes. Ça passe toutes les portes, me dis-je. Et donc je regardais la fin du film, encore à l’instant dans cette chambre louée en Airbnb, à proximité de la gare de Nantes, côté sud, parce qu’il n’y avait plus de place dans les studettes. Il n’y avait plus de studettes libres cette semaine et il n’y en aurait pas plus la semaine prochaine et déjà, en arrivant, j’avais réservé également la chambre pour la semaine suivante.

Il n’y avait pas de place dans les studettes parce que tout le monde était venu cette semaine pour les évaluations des étudiants de premier cycle et il n’y aurait pas plus de place la semaine prochaine parce que tout le monde était convoqué pour le concours d’entrée.

Aujourd’hui il faisait froid à Paris et à Nantes. J’avais heureusement mis un pull. Et les pollens étaient de sortie. Les yeux se mettaient à piquer et les nez se mettaient à couler. À midi, j’avais eu faim, m’étant levé à cinq heures, et j’avais opté plutôt pour un hamburger, après avoir envisagé un menu végétarien light chez Dubble. Après le évaluations, nous avions travaillé avec A.C. au mixage de la bande son de son passage de diplôme, qui doit avoir lieu le 18 juin.

J’avais également reçu un message de E.B. avec des plans alternatifs pour le studio à la Martinique et un autre message, de K.S., concernant un nouveau projet dans le 7e arrondissement de Paris. Il y a du pain sur la planche, on dirait.

Et maintenant, il se faisait tard et je venais de terminer Hiroshima, après avoir aussi revu la fin de a History of Violence de Cronenberg, qui est décidément un film entonnoir, pensais-je, un film tout en accélération, pensais-je, sans pour autant être un film rapide, pensais-je.

Et donc, j’étais en train de me dire bon qu’est-ce que je regarde maintenant ? Ou bien, peut-être qu’il n’est plus guère l’heure de regarder quelque chose et qu’il serait temps de plutôt éteindre et d’écouter la radio ? Ou peut-être que je pourrais tout de même essayer de regarder quelque chose.

Le temps de chargement du site est effroyablement long, m’étais-je dit, tout à l’heure à l’école et encore ici maintenant. J’espère que c’est passager.

C’EST PAS GAGNÉ

Le candidat d’extrême-droite a fait plus de 40% au premier de tour de l’élection roumaine. Ça va être serré. Chaque jour, les actualités sont plus une souffrance qu’une joie. Réveil presque impossible. Me rendors. Me relève. Me rendors. Trop mangé et bu hier soir, ce qui n’arrive pas souvent, heureusement.

C. était venue dîner. R. avait annulé, comme je l’avais prédit. R. annule toujours. D’ailleurs, lorsqu’on me dit que R. va venir dîner, je fais comme si elle n’allait pas venir et, effectivement, elle ne vient pas. J’avais préparé de la raie au beurre noisette, pour Ro, qui ne mange pas de viande. Mais Ro s’était gavée d’omelette et de frites dans l’après-midi et elle n’a pas touché au poisson. D’ailleurs, il en reste dans le frigo. Avec de bonnes pommes de terre nouvelles du marché, me dis-je.

Et puis Ro avait préparé deux banana breads au chocolat et nous nous sommes repus de banana bread au chocolat, que Ro nous a regardé ingurgiter. Et puis j’avais pris d’excellentes fraises au marché, que nous avons aussi assassinées. Et pas mal de vin blanc. Donc, diète, diète, diète.

Un peu de rapatriement d’anciens post. Février 2008. Et là, les jours ne sont plus les mêmes parce que l’année 2008 était bissextile, contrairement à l’année 2025. C’était le petit suspens de la journée.

Hier, nous étions allés à Thoiry avec S. et je me demande pourquoi on n’avait pas fait ça plus tôt, parce que l’endroit est parfait pour les enfants et beaucoup plus marrant que le zoo de Vincennes. Mais justement parce que c’est plus marrant on ne fait pas autant de films, me dis-je. Le zoo de Vincennes a donc du bon, me dis-je.