Désorientation

Samedi matin, j’ai acheté ce livre à la FNAC, L’invention de Morel d’Adolfo Bioy casares, sur le conseil de M.S. J’avais oublié d’en parler précédemment. Depuis, j’essaye de le lire, mais ma lecture est sans cesse perturbée par des digressions de mon esprit et je m’aperçois que je viens de lire trois ou quatre pages sans avoir la moindre idée de ce qu’elles contiennent. Il me faut fréquement revenir en arrière. Et ma pensée s’égare de nouveau. C’est très fatiguant.
On pourrait croire que c’est parce que je suis préoccupé, ce qui est le cas, mais, par exemple, la lecture de Proust que je poursuis parallèlement ne provoque pas du tout le même effet. Il me faut donc en conclure que c’est bien le propre du livre de Bioy casares. Je ne sais pas encore dire exactement en quoi cela consiste techniquement. Il me faut poursuivre.

Ci-dessus, l’image de ma profonde détresse, lundi soir, envoyée par mail à H.D.
Sorbet framboise, banane, cassis que je me suis fait servir dans la chambre n° (celle au néon vert clignotant et aux stores vénitiens). 
Par-dessus le marché, la crème chantilly n’est pas fraîche.
Il n’y a rien à la télé. Je n’arrive pas à lire.
Cela dit, je trouve rétrospectivement à cette image une vraie qualité picturale.

Petites annonces pour trouver un appartement. Déprimant.
J’appelle F.D. qui me propose de partager son loyer et d’habiter chez lui pendant sa longue absence Lyonnaise. Nous prenons rendez-vous demain après midi.
Il faut aussi que je prépare le stage son de la semaine prochaine et notamment le cours d’histoire de la musique de lundi. Le temps file à toute allure. Angoisse.

Discontinuité

Commençons sur une note joyeuse: la droite s’est faite méchament dégommer hier. 
Une question, comme ça: et si on rendait l’Alsace à l’Allemagne ?
Sinon, pas beaucoup de blog ces derniers jours. pas eu beaucoup de temps ni très envie.
Projection de Polyeucte jeudi soir à la FEMIS. Plutôt un succès, il me semble.
Possibles bouleversements de ma vie privée dans les semaines, les mois à venir…
J’en discute avec H.D. à la terrasse d’un café, samedi en pleine manifestation des sans-papiers.

Il y a pas mal de boucan, évidemment.
J’essaye d’enregistrer avec mon téléphone. 

Il faut que je parte prendre mon train..

CA SENT LA RENTRÉE

Il fait frais le matin. 15° au réveil. Il y a plus de bruit dans la rue. Plus de monde dans le métro.
Les commerces réouvrent. La circulation se densifie.
Je mets un pull. Ca gratte un peu au début.

Faire des travaux ça occupe l’esprit presque à plein temps. Je passe la nuit à me demander s’il faut vraiment que je conserve cet énorme radiateur à accumulation de chaleur, qui a le mérite d’être très économique, mais le défaut d’occuper une place folle. Dix fois, en pensée, je le détruis, dix fois je le reconstruis. Et je pense au circuit électrique. Au tableau qu’il faudrait. Au dégât des eaux. L’entrepreneur doit venir jeudi prochain mesurer le taux d’humidité. Je risque d’avoir encore à attendre un ou deux mois que ça sèche. J’ai acheté plein de sacs à gravats chez Leroy Merlin ce matin et j’emporte plein de fils électriques et des baguettes qu’Y. avait stockés dans sa cave. Demain abattage de cloison avec F. et T.
Me suis renseigné sur les carreaux de plâtre et l’art de les couper, les assembler et de les faire tenir debout sur leurs bases de PVC. 

Il faut aussi que je commence à écrire l’article sur les blogs que j’ai promis à C. Et M.S. revient bientôt pour reprendre le montage. Vague angoisse d’être pris de court par le temps. A propos de C., suis allé dîner chez C. et M. avant hier, au 29ème étage. La vue est belle et donne envie d’y tourner une séquence.

A propos de blog aussi, me trotte dans la tête la nécessité d’échapper à la surveillance, d’inventer un mode d’écriture qui, sans être vidé de toute substance, ne se résume pas à ce récit de moi-même et ne puisse servir d’instrument de contrôle (fût-ce de self-control). Cependant, pour l’instant, je préfère prolonger l’expérience sans trop d’a priori formel. Sans attacher trop d’importance au résultat. Et puis la période est un peu trop confuse. Il faut que je pose mes valises et que je range mes affaires avant de prendre des décisions radicales. Mangé des tomates et des courgettes du jardin de papa et c’est bien bon. Plus de cigarettes depuis huit jours et j’ai arrêté les NTB. Je me mords un peu les joues à force de mâcher des chewing gum et ça me donne de l’aérophagie mais c’est une phase transitoire.

Soleil et rideaux de cuisine

Hier matin, il fallait que j’aille faire des photocopies laser couleur du dossier de candidature pour l’Ecole nationale supérieure d’art de Dijon. En 3 exemplaires. Puis, destination FEMIS, avec la cassette de Polyeucte, pour la projection de jeudi. S.C. l’assistante de R.R. me reçoit d’abord un peu fraîchement, alors on s’explique. Il s’avère qu’elle n’a pas les bonnes informations, que personne n’est prévenu à la FEMIS, etc… Il faut que j’envoie une dizaine d’e mails en rentrant.
A propos d’e mail, il y a une nouvelle attaque virale en cours: au moins 25 e mails à détruire dans la journée, avec des pièces jointes fantaisistes.
Sinon, je vais essayer de mettre au point un système de codification des noms propres qui me fournira une alternative aux sempiternelles initiales. En plus, il y aura un côté « happy fews » pour ceux qui parviendront à les décrypter. Par exemple, qui se cache derrière Easter Tambourine ?
Message de Mickael Marécage. 

Gros vent…

Et coup dur pour les élèves de 4ème année qui travaillent depuis des semaines à cette maison de carton.
Il fait froid. Ca rend nerveux. Il y a de l’électricité dans l’air.

Lundi matin, je vire M.W. qui, pour la nième fois pique sa crise. Elle m’énerve tellement que je finis par lui dire carrément qu’elle est « complètement idiote ». A posteriori je regrette cette phrase blessante parce qu’elle peut sembler définitive et effectivement c’est gagné: elle se braque tout à fait. Mais là, c’est la goutte d’eau…Cette fois ci je suis déterminé à ne pas la repêcher. Elle est virée du cours et pas mécontente de l’être. Déjà S.H. n’avait pas cru devoir revenir après la douche froide de la semaine dernière. Nous avons encore droit à une pénible explication avec C.D. qui s’offusque lorsque je déclare que donner son opinion ce n’est pas encore tout à fait penser et que nous attendons de lui qu’il présente des arguments, des raisonnements, des faits, etc… C’est comme si je lui disais qu’il était puni. Il me dit que suis trop injuste et que je décourage les meilleures bonnes volontés. Il faut 45 minutes d’explications pour lui redonner du courage. Je lui propose, par exemple, de ne pas se sentir obligé de continuer à venir au cours et que s’il s’inquiète pour ses U.V. on trouvera bien un arrangement pour ne pas le pénaliser. Mais apparemment, il s’accroche. Bon. Consternation générale. 

Heureusement, le reste des élèves de seconde année partage mon dépit, ma sidération devant ces comportements de collégiens et me reproche même ma trop grande patience. Lles pauvres, ils doivent supporter les 45 minutes de négociations verbales nécessaires pour extraire un reste de dignité à ces crétinos du fond de la gadoue dans laquelle ils se sont minutieusement embourbés. Ce soutien me réconforte: Je n’ai pas l’impression de délirer tout à fait, ni d’exiger un effort surhumain de la part des élèves. Juste un minimum de savoir-vivre. C’est dément!

Après ça, l’après-midi, avec les élèves de première année est une véritable bénédiction pour les nerfs. Et le soir, au Fresnoy, la projection de Eloge de l’amour me réconcilie avec Godard. D’abord parce que c’est assez sublimement beau, mais surtout parce que j’y retrouve à peu près tout ce qui me préoccupe en ce moment: ce règne dégoûtant et universel de la marchandise, l’extrême nullité de notre environnement sensoriel, la Boétie, ce que c’est qu’être adulte. Malgré tout ce qui m’agace chez Godard, qui est là aussi, j’éprouve un sentiment de contemporanéité avec ce qui anime ce film. C’est une bonne nouvelle.

Je ne fais presque pas de photos en ce moment et H.D. a raison de dire que le lundi c’est vaches maigres.

Dans le train, drôle d’installation des sièges en face à face d’une rangée à l’autre. Curieuse vision.
A Paris aussi il fait froid.
J’ai terminé A l’ombre des jeunes filles en fleurs et j’attaque le côté de Guermantes.
Il faudrait que je prenne des notes de lecture…

Promenade dominicale

Beau soleil ce matin. 
Suis parti voter de bonne heure, vers 9 heures, puis me promener.
Il fait frais mais beau, alors que la météo – toujours succinte – de France Culture annonçait ce matin du mauvais temps et de la pluie sur tout le pays.
Pas mal de monde au Trocadéro.

Au pied de la tour c’est carrément la folie. Pire que dans une queue de téléphérique à Courchevel.
Je décide de prendre par le Champ de Mars. Je ne vais jamais par là, alors tiens pourquoi pas ?
Malgré la printemps, les arbres sont encore bien nus.

Petite promenade dans les rues adjacentes, ambiance très 1900.
Une maison murée, à l’angle de l’avenues Charles Floquer et de la rue Champfleury, semble ê^tre un ancien squat. Le mot « Adieu » est bombé sur l’une des façades. C’est triste.

La plupart des maisons de l’avenue Charles Floquet ont été construites entre 1909 à 1929. Plus j’avance, plus les maisons sont récentes.

Ensuite je me dirige vers Montparnasse.
En chemin, je tombe sur la plaque de ce médecin, dont le nom inspire évidemment confiance.

Ici manque une image dont le nom de fichier est 032104_docteur_pipeau.jpg

Je dirige mes pas vers la fondation Cartier, mais il est encore trop tôt et je vais prendre un café à Denfert en attendant midi.

Il est interdit de prendre des photos m’est-il signifié dès que je fais mine de sortir mon appareil. Alors, l’air de rien, je vole quelques images avec le téléphone.
Kelvin 40 le jet biplace de Marc Newson est un gadget chic.
Les peintures à textes de Cheri Samba m’intéressent davantage, mais l’art à message…hmm…
J’ai du mal.

En tous cas, dans le jardin, c’est vraiment le printemps. Pas de doute.

Cent fois, mille fois sur le métier…

Aujourd’hui, H.V. devait venir pour tourner un nouvel opus de Communication
Finalement, elle m’a laissé un message hier soir pour annoncer qu’elle est malade et qu’elle ne viendra pas aujourd’hui, qu’il va falloir reporter, trouver une nouvelle date…
En vrai, ça m’arrange: il faut que je remixe Polyeucte. Trop facile de dire que le son du jeu de Paume n’était pas bon: la vérité, quand je réécoute c’est que ce mixage n’est ni fait ni à faire.
J’avais tout mixé beaucoup trop fort. Sans doute parce que j’écoutais à trop faible niveau. Du coup, les ambiances étaient beaucoup trop présentes, les voix saturaient, etc… Bien sûr, ça ne se voyait pas après passage dans le compresseur, mais tout était bouché, strident, hurlant.

Donc, journée de mixage avec juste une pause pour 
(…)
Vent et petit crachin. 
(…)

Ma mère m’écrit des e mails:

je m’amuse à lire ton journal, mais je regrette qu’il soit dans un trop
grand format pour une lecture agréable.
Je suis heureuse que ton film soit diffusé à la Fémis, mais je ne serai pas
là la semaine prochaine, je vais passer quelques jours près de maman
qui se remet lentement.
câlins
maman

Mon père aussi:

Merci Bonhomme pour cet intéressant reportage dans le passé.
C’est certainement dans cet appartement que notre petite famille a connu ses moments les plus heureux, avec la présence proche de Daddy et Nanie à une époque où ils étaient encore en bonne santé, du moins au début.
Si c’est le début d’une série, tu risques d’avoir des difficultés pour pénétrer dans le pavillon de Maisons-Alfort si ceux qui l’occupent sont ceux à qui nous avons vendu.Ce sont des gens de la famille du maire ou quelque chose comme ça, super bourgeois et distants.
En revanche, l’occupant de l’appartement de Saint-Maur, qui lui aussi habite seul avec sa fille sera surement plus accueillant.
Mais j’anticipe , ce n’est peut-être pas du tout ton intention.
Je t’embrasse très fort, j’espère que nous pourrons nous voir bientôt .
Papa

C’est drôle, j’ai l’impression d’avoir 5 ans.

Sinon Protools 6.2.2 avec Mac OS X 10.3.3 semble beaucoup plus stable mais hélas fini la manip dans le Terminal qui permettait de remettre à zéro les démos de plugins RTAS.
A chaque progrès correspond une perte.
Bon je retourne aux jeunes filles en fleurs…

Mais aussi, e mail de K. et coup de fil de A. qui travaillent toutes les deux à l’école du Magasin de Grenoble. De la part de J-M. C. (dont j’aimerais bien avoir des nouvelles, d’ailleurs, s’il lit cette phrase).
Premier e mail, hier soir:

(…)Nous sommes actuellement en formation aux pratiques curatoriales à l’Ecole
du Magasin (Centre National d’Art Contemporain de Grenoble).
Notre cursus se termine par la réalisation d’un projet curatorial. Cette
année nous avons choisi de traiter la question de la réalité à travers les
médias, axe nous permettant d’introduire de nombreuses notions annexes telles
que l’exhibition, l’intimité, l’aveu, la scénarisation du réel, l’identification,le
réalisme…
Nous souhaiterions énormément pouvoir voir vos videos et pour ça nous nous
permettons de vous ecrire en vous demandant s’il est envisageable de nous
envoyer une cassette avec vos travaux.(…)

Je suggère plutôt qu’on se rencontre, si possible.
Coup de chance A. vient à Paris vendredi prochain, donc rdv.
Apparemment, il s’agit de l’édition d’un DVD mais je n’ai pas encore tout compris et ne sais
vraiment pas si je peux proposer quelque-chose pour ce projet.
Nous verrons bien…

Enfin, j’ai engueulé V. qui m’appelle toujours quand il a un problème de hotline sur mac: il avait installé Quicktime 3 (!) sur Mac OS 9, ce qui a tout planté..Bien fait pour lui.

Petit déjeuner chez Paul

J’ai pris La recherche avec moi mais difficile de lire dans le bruit des percolateurs et le tintement des pièces. Il y a du monde chez Paul, le matin. Des habitués qu’un des garçons, coiffé d’une toque blanche, salue avec chaleur comme s’il n’avait fait que les attendre depuis des heures. Le jus d’orange est frais, le pain aussi. Miam, miam…Hier, après-midi avec C.R., notre ami roumain sans papiers à courir du GISTI aux Médecins du Monde pour se renseigner sur différentes démarches censées lui permettre d’une part d’attaquer un de ses patrons qui refuse de le payer -la permanente du GISTI n’est pas très optimiste sur ce point – d’autre part de faire soigner ses dents qui le font horriblement souffrir. Nous prenons les horaires du bus dentaire et un formulaire de demande d’aide médicale. C. est épuisé: il n’a pas dormi depuis 30 heures et doit encore enchaîner une nuit de travail après ça. Il ne peut rien avaler à cause de sa rage de dents. Il dort debout dans le métro, adossé à un arbre, assis à la terrasse d’un café. Moi, je l’assomme de questions, parce qu’il faut que je rédige un courrier pour le GISTI. J’apprends que son véritable métier est d’être vétérinaire, spécialiste de la fécondation artificielle des vaches. Il a même eu une très bonne proposition de travail mais sans papiers pas possible. Au lieu de quoi il se fait arnaquer par des petits patrons minables et sans scrupules, à peu près assurés de leur impunité.

Ci-dessus, le plan de quartier du GISTI. Médecins du monde se trouve au 64, avenue Parmentier mais je ne les trouve pas référencés dans les pages jaunes. A propos de pages jaunes, celles-ci proposent pour certains quartiers des grandes villes des photos et on peut se promener avec des flêches d’un point à un autre. Par exemple, j’ai réussi à voir notre immeuble en partant du Franprix qui est au bout de la rue. Ce même Franprix devant lequel C.R. fait la manche et où il donne des coups de mains aux caisses pour remplir les sacs.

Appel de M.S. avec qui je dois déjeuner. Je lui donne rendez-vous à La victoire suprême du coeur 41, rue des Bourdonnais 75001 Paris à 12h45. Toujours dans la série des chroniques culinaires en suivant le guide des restaurants bio et végétariens.

Au coeur suprême de la victoire


Victoire suprême du coeur 41, rue des bourdonnais 75001 Paris.
Nous y voilà.
Problème, indépendant de toute volonté: nous sommes à 10 mètres du QG de campagne de l’insupportable André Santini, dont le visage en 4×3 règne en maître incontesté dans le contre-champ (que je n’ai pas photographié). La terrasse n’est pas particulièrement glamour. Il y a des livraisons dans la rue et donc pas mal de bruit et de gaz d’échappement.

A l’intérieur, c’est sinistre. Propre et sans âme. Vaguement déprimant. Tranquille pour lire, cependant. Pas de radio ni de télé hurlante. C’est déjà ça.
M.S. est en retard.
Pas grave, je lis la recherche. On devrait dire « je relie » la recherche et non « je relis ». Il s’agit bien de reliaison, bien plus que de relecture. Mais passons.
Et quand M.S. arrive enfin, le voilà pendu au téléphone.

Enfin nous commandons. Formule 1 entrée+ 1 plat pour 10,80 €. Ca paraît correct.
En entrée nous prenons des soupes. M. aux légumes variés, moi carotte-gingembre. 
M.S. fait des jeux de mots que le patron semble prendre de travers.

Les soupes sont inertes, l’aspect est quelconque.
Détail rédhibitoire: la nourriture (cela se confirme par la suite) est BEAUCOUP TROP SALEE.Le gingembre est absolument théorique, indétectable. A part ça, le goût est correct. RAS.

Nous prenons ensuite deux assiettes de légumes.
Les aubergines sont noyées dans le sel. L’ensemble est grossier: du ebly bouilli, des pois écrasés, une purée de carottes correcte mais trop salée, elle aussi.
Ca n’est pas vraiment mauvais. Juste sans intérêt. Et trop salé.
Heureusement, la conversation de M.S. est bonne et il me dit plein de choses utiles, concernant Polyeucte et mon travail en général, qui me donnent de quoi méditer cet après-midi. Et ça tombe bien puisque j’ai mon rendez-vous avec A.C.

Soleil de printemps


Le beau temps et la tièdeur nous sont tombés dessus sans crier gare. 
Evidemment, je m’étais préparé au grand froid tourquénois; j’étais donc en nage avec mon manteau d’hiver, mon pull et mon écharpe.
21 °C. Dans une ambiance de crise paranoïaque et de plan vigipirate niveau rouge.

Etant mal rasé, je suis certainement un peu suspect et les policiers en faction sur le quai me demandent de me mettre sur le côté et d’ouvrir ma valise. 
Je suis obligé d’exhiber ma trousse de toilette et mes chaussettes de rechange. C’est un peu humiliant mais je m’y prête de bonne grâce. Ai-je le choix ?

Dans le train de 7h58, que je prends tous les lundi pour me rendre à Tourcoing, j’aime lire le journal d’un bout à l’autre. Parfois je commence par feuilleter une revue mensuelle consacrée à des appareils informatiques et j’ai envie de tout acheter. 

Je glâne ça et là d’épatantes et indispensables astuces pour mieux utiliser mon ordinateur ou tel éclaircissement sur des bizarreries parfois inexplicables dans son fonctionnement. 
Par exemple, j’apprends que si l’icône en forme de drapeau située dans la barre des menus qui représente le type de clavier sélectionné bascule à chaque démarrage sur le drapeau américain, il s’agit là d’un bogue répertorié du système provoqué par le fait que le nom de fichier du fond d’écran sélectionné ne se termine pas par « .jpg ». C’est très utile à savoir, comme on peut se le représenter. 

Ensuite donc, je me plonge dans le journal et je décide, tout en lisant, quelle sera la note sur laquelle je commencerai mon cours de 10h00 avec les élèves de deuxième année. Cela dit, la plupart du temps, j’ai tout à fait oublié en quoi consistait cette note lorsque le cours commence réellement et c’est généralement une remarque faite par l’un des élèves ou quelque considération sur le temps qu’il fait qui lui servira, en fin de compte, de point de départ.

Dans le train de 7h58, je ne peux pas lire autre chose que le journal ou des revues mensuelles consacrées à du matériel informatique. Pas de roman, pas d’essai, rien de trop prenant. Il est nécessaire que mon esprit puisse divaguer à son aise et que ce que je lis n’ait pas trop d’importance.

En revanche, dans le train du retour, le mardi (qui part de Lille entre 17h30 et 19h selon les jours), je n’ai pas du tout envie de lire le journal et il m’est plus agréable d’écrire ou d’être absorbé par la lecture d’un livre que je continue de lire, au risque de percuter quelque obstacle, en marchant sur le quai, en prenant l’escalator, en oblitérant mon ticket et en faisant basculer la barrière rotative de l’entrée du métro, sur le quai du métro, dans la rame, dans les couloirs de correspondance, sur le second quai, dans la seconde rame de métro, dans la rue, dans l’ascenseur, sur le pallier, pour ne finalement le lâcher qu’étant entré et pour déposer mes affaires et retrouver une existence normale.

Le cours du matin est souvent décevant. Les élèves n’ont pas travaillé. Par exemple, la semaine dernière, je leur avais demandé de faire une revue de presse et rien… Cette semaine, peut-être avaient-ils préparé quelque-chose mais comme il y avait des travaux à regarder, nous n’avons pas eu le temps d’aborder la question. Je suis amené à sermoner beaucoup les élèves de deuxième année. C’est fatiguant.

L’après-midi, le cours de première année est plus expérimental. Parfois, je me ridiculise. Par exemple, la semaine dernière j’ai éclaté en sanglots en lisant aux élèves Le discours de la servitude volontaire de La Boétie. En fin de lecture, j’étais obligé de m’interrompre pour reprendre mon souffle et boire de l’eau. Du coup cette semaine, à chaque fois que je m’apprête à citer un texte, les élèves se demandent si je ne vais pas me mettre à pleurer… Nous avons aussi regardé le début de El de Bunuel, dont j’ai laissé le DVD à C.L. pour que les élèves puisse le visionner intégralement pendant la semaine.

Lundi soir, jury avec T.M. et V.M. Nous voyons trois élèves de cinquième année afin de déterminer s’il est opportun de les présenter au DNSEP. Après d’âpres discussions avec chacunE d’entre euxELLES nous décidons d’émettre trois avis positifs. Je suis fier de l’énorme progrès fait par A.B. depuis notre rencontre la semaine dernière, même s’il me paraît difficile d’aller jusqu’au bout du travail qu’elle a entrepris d’ici la fin de l’année. Nous sommes convenus de nous voir tous les mardi pour faire un point sur son travail.

Mardi, rendez-vous avec A.B. puis installation de logiciels avec T. qui s’occupe de moi comme une mère, me nourrit, m’apporte du chocolat, des pommes, des sandwiches. Rendez-vous divers.
Le printemps revient. Je prends le train de 17h30, plongé dans La recherche

Cinémathèque, avant-première de Triple agent, le nouveau film d’Eric Rohmer. Film très curieux, ingrat au moment de sa vision, mais qui travaille étrangement. Bousculade épouvantable et désagréablement mondaine à l’entrée. On se croirait aux bains-douches. Eviter ce genre de soirée à l’avenir. Vraissemblablement, j’irai revoir le film en salle, plus tranquillement. A la sortie nous retrouvons E.G. qui est en plein tournage et assez épuisé, mais non moins hilare et les frères G. dont je prend des photos pour me souvenir, à l’avenir, qui est L. et qui est D.

Ce matin, passage de P.B., venu emprunter du matériel son pour son tournage et que nous avions aussi croisée hier soir. Nous parlons du film en prenant le café.

Tandis que j’écris, Jean-Marie Straub et Danièle Huillet passent à la radio. Je n’entends pas vraiment ce qu’ils disent, incapable de me concentrer sur deux choses à la fois, mais je reconnais la musique.

Café

Réveil 5 heures. Trop tôt. Pas fini d’assimiler le demi Imovane.
Café zombiaque et au ralenti.
Mail de H.D. qui submarine.
(…)

Sinon, je ne suis pas super motivé pour sortir et prendre le train là mais à la guerre comme à la guerre. Un peu de RDTP avant de me faire violence (et un second café, définitivement).