
En me promenant, j’avais été interpellé par ce caniche blanc dans une vitrine.
Il – ou elle – disait:
– Je suis une petite pute. La petite pute de Donald Trump.
Et aussitôt je m’étais senti investi de la mission d’aller porter ce petit caniche au gros porc blond.
Parallèlement, un petit garçon gravissait une montagne, calquée sur le modèle du Puy de Dôme, en suivant les rails, pour parvenir jusqu’à la terrasse du président des Etats-Unis, en faisant semblant de chercher sa balle.
Son père – qui était aussi moi – tentait de le rattraper, tandis que le petit garçon gravissait, gravissait et que résonnait l’hymne national des Etats-Unis (méconnaissable).
Simultanément, je me présentais, serrant le petit caniche sous mon bras, à la porte des bureaux du gros porc blond et j’étais reçu par un jeune type qui me dit, textuellement:
– Je suis la secrétaire de Bill Clinton.
Je ne m’attendais pas à tomber sur Bill Clinton.
Je dis que je viens voir le président des Etats-Unis et que je dois lui remettre quelque chose.
Le type prend un air contrit, m’attrape par les épaules et m’amène devant un comptoir, derrière lequel se tient un employé à la gueule cassée – certainement un vétéran d’Afghanistan ou d’Irak – et tout en désignant ledit employé, « la secrétaire de Bill Clinton » me dit: « voilà la contribution du président des Etats-Unis ».
J’aimerais lui objecter que, si l’on peut faire toute sortes de reproches au gros porc blond, il n’est tout de même pas responsable de l’envoi de troupes en Afghanistan et en Irak par d’autres gouvernements, qui l’ont précédés, mais je m’en abstiens, jugeant que c’est peine perdue.
Au fond du couloir, je vois le bureau du gros porc. Des tas de gens se bousculent à sa porte pour recevoir des cadeaux qu’il distribue à tour de bras.
J’ai envie de dire:
– Moi, je ne veux pas de cadeau, je veux juste livrer mon paquet et je m’en vais.
Mais encore une fois je ne peux pas parler.
Et pendant ce temps là, de l’autre côté, le petit garçon est parvenu au sommet.
Il pleure, parce qu’il est fatigué. Son père (moi) essaye de le consoler et le bruit qu’il fait attire l’attention des invités du président, qui se trouvent sur la terrasse.
Je suis étonné que nous n’ayons pas été arrêtés par des agents de la sécurité. Nous pourrions être des terroristes et il est si facile de se trouver là. Nous pourrions nous jeter sur les invités, sur le président et tous les égorger. Rien ne nous en empêche. Mais nous n’avons pas du tout prévu de faire ça.
Je prends le petit garçon dans mes bras pour le consoler et tourne le dos à la terrasse, aux invités du président. Le petit garçon – lui – leur fait face et soudain son visage rayonne de joie et il dit:
– Oh, le voilà, le sublime dieu blond!.
Ne pas regarder. Ne pas se retourner.
Une phrase se met à tourner dans ma tête, qui parle d’un être – mi caniche, mi jeune femme – et dit d’elle quelque chose comme: elle convoite les dieux des cieux et les cieux aussi; elle convoite ce que personne ne songerait à désirer.
Il y avait une belle figure de rhétorique et des verbes adéquats mais j’ai tout oublié.
Dimanche soir j’ai désactivé mon compte Facebook, effacé l’application de mon téléphone et hier j’ai pu travailler dans une sérénité nouvelle, que je n’avais pas connue depuis longtemps. J’ai passé une bonne partie de la journée à restaurer les photos du blog (années 2004-2005), à faire un peu de piano, à accompagner C. au conservatoire.
Session Skype avec I.I. et V.P. pour le truquage d’une séquence.
I. m’envoie les éléments. On regarde avec P. et c’est coton.
Puis je rejoins P. au musée des arts décoratifs. Il y a un vernissage, mais tellement de monde que nous renonçons à entrer et allons manger un ramen dans un des restaurants japonais de la rue St-Anne.
Ensuite nous allons boire quelques verres rue Montorgueil, avant de rentrer.
Et là, par exemple, sans exhaustivité et pas nécessairement dans cet ordre: Hong Sangsoo, Guiraudie, la primaire du PS et les élections à venir, le programme de Benoît Hamon, la vie conjugale et le sexe, le désir et le travail, le temps, l’obstination (et le malgré soi), le pop corn, la République Tchèque, le Sancerre, la confiance en soi, penser que son monde est le monde, le refus de l’analyse, est-ce que ça ne t’embête pas si je…?, avoir un bon copain, écrire, une revue, Surmachine, demain, écrire.