EMBARQUEMENT IMMÉDIAT

Comme il est difficile de restituer la véritable expérience de la forêt, me disais-je en regardant ces photos prises pendant notre promenade, avec C.B.
Et à propos, j’en ai un tout petit peu marre des initiales.
Il faudrait que je trouve, pour chaque personne, un surnom, qui ne soit pas vécu comme insultant, rabaissant, réducteur, etc. Il faudrait qu’on tombe d’accord sur une appellation au cas par cas.
Mais ça va être épuisant, me dis-je.
Autant commencer par donner des surnoms et corriger en cas de réclamation.
Oui, faisons cela.

Ainsi, je ne dirai plus que je me promenais avec C.B. A la place, je dirais que je me promenais avec Jane Fondu Moldove et elle me corrigera si cette appellation lui disconvient.
Et donc, avec Jane Fondu Moldove, nous cherchions des champignons que jamais nous ne trouvâmes, parce que, tout simplement, il n’y en avait pas.
Je me suis, depuis, allégé de la somme de 12 € pour télécharger une carte des champignons dans le département, que je mettrai à l’épreuve des faits à mon retour de Séoul, en fin de semaine prochaine.

Car pour l’heure, je suis assis en salle d’embarquement K51 du terminal 2E de l’aéroport Roissy Charles-de-Gaulle et j’attends l’avion Air France AF0264 à destination de Séoul Incheon airport. Embarquement prévu à 13h20. Décollage à 14h15.

Je relis le discutable mais passionnant « La Corée et les Coréens » écrit par un jeune diplomate italien qui tint au pied levé le poste de consul d’Italie à Séoul pendant huit mois, de novembre 1902 à juin 1903 suite au décès de l’ambassadeur, victime du typhus. Je potasse un peu l’actualité artistique coréenne, par ailleurs.

Il paraît qu’il fait froid la nuit et chaud pendant la journée. J’ai pris des chemises et des pulls. Et même un bonnet et une écharpe.

Dans le TGV de Poitiers à Roissy, une contrôleuse, apparemment en verve, recommande aux passagers assis devant moi un excellent restaurant à Lille.
Je tends l’oreille.
Les compagnons de la grappe, elle dit.
Alors là, je me lève et je dis: oui, je confirme, c’est un très bon. Moment de communion gastronomique.
Ça commence bien, me suis-je dit.

Dans le domaine bancaire, c’est moins brillant.
Je jongle avec les crédits revolving et in’Li prétend m’avoir fait un virement le 4 novembre mais nous sommes le 7 et, Anne ma sœur Anne, je ne vois que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie.
Un appel à mon conseiller bancaire, encore et toujours en rendez vous clientèle.
Je confie à la personne qui me répond, que tout va bien, qu’il ne panique pas, que de l’argent arrive en abondance, sous quinzaine.
Restons zen.
Je préviens, à toutes fins utiles, que je serai difficile à joindre.
En Corée, pour la semaine.
Ça fait sérieux, j’imagine.
Ou pas.
Je ne sais pas.

Appel d’Anouk Aimée qui est en pleine conférence de philo. Le téléphone sonne alors qu’un employé zélé de la sécurité aéroportuaire examine mon sac à la recherche d’éventuelles traces d’explosifs. Fort heureusement, il n’en trouve pas.

J’ai pris des bouteilles de vin pour offrir aux personnes qui m’invitent et ont gentiment organisé ce voyage. Je ne les connais pas assez encore pour leur donner des surnoms, alors je vais dire la professeur de référence et le (ou la je ne sais pas très bien) régisseur (ou régisseuse) général-e.

J’étais arrivé avec beaucoup d’avance et je vois que la salle s’est peu à peu remplie autour de moi. Il y a des poubelles-aspirateurs robots qui se baladent en essayant d’éviter les voyageurs. Certains s’en amusent et les embêtent. C’est pas gentil.