
En ce moment, je fais plutôt des rêves apocalyptiques. Des rêves de zombies.
Mais les zombies, on ne fait que les attendre. Ils n’arrivent jamais.
On se cache, on rase les murs mais toujours pas l’ombre d’un zombie.
Même les zombies nous ont laissés tomber, on dirait. Même les zombies n’en veulent pas, de ce que nous sommes devenus, de ce que nous possédons, de la portion d’espace que nous occupons. Je dis « nous » parce que je ne suis jamais vraiment tout seul. Nous sommes toujours déjà au moins deux.
Il reste l’idée d’ une menace sourde mais on a trouvé l’angle mort, la portion de nature sans attrait. On a établi la ligne de démarcation au delà de laquelle il n’y a plus rien de désirable pour personne et du coup, c’est véritablement enfin cela le Paradis.
Le Paradis c’est d’occuper un terrain que personne d’autre ne songerait à occuper.
Il ne faut pas en faire publicité, de peur de provoquer soudain un intérêt chez autrui pour ce territoire désaffecté.
Alors on prend un train. Il y a des barges qui filent, folles, sur les rails et il suffit de sauter en marche. Une fois dessus, il faut s’allonger pour éviter les jets de pierre. Car il y a des jets de pierre et même – paraît-il – des coups de feu.
On m’a donné la 123 hier et il y avait peu de réseau.
La douche, c’est juste un trou dans le mur.
Comme à la piscine, un peu. Et il faut appuyer sur le bouton toutes les vingt secondes.
La pression est forte. Cela tient davantage du karcher que de la douche. Ce n’est pas franchement agréable mais ça réveille. Il faut simplement éviter le premier jet, glacé. Pour cela, appuyer sur le bouton et vite refermer la porte sur soi. On ne peut pas totalement éviter les embruns mais on évite la congélation.
Il fait froid aux pieds dans cette auberge de jeunesse. D’avoir marché sur ce sol froid me donne toujours des crampes au moment de me coucher.
Les draps ne sont jamais très propres. Il ne faut pas y regarder de trop près. Les tâches ne partent pas et s’accumulent. La couverture est douteuse.
Le matin, je me suis dit: « non, leur petit-déjeuner, décidément, je ne peux plus. Je n’irai pas. ». Et puis j’ai regardé ma bouteille de Coca Zéro tiède et je suis finalement descendu boire ce qu’ils appellent un café. Avec, j’ai avalé deux galettes de son d’avoine avec du jambon, puisque jeudi c’est protéines. Régime punitif sur le plan gastronomique mais salutaire pour ce qui est du transit intestinal. Le jeudi, c’est le jour du ventre qui gargouille et des étrons moulés comme dirait E.T..
Tempête depuis hier soir. Les vélos de la Ville de Dunkerque (DK Vélos) sont tous couchés sur le flanc.
Hier soir j’avais pédalé contre le vent; ce matin j’ai plus de chance bien que le vent souffle toujours: je l’ai dans le dos.
Avec les étudiants, nous répétons et tournons une version « brouillon » de la scène que nous devons tourner cet après-midi au Conservatoire.
FLORIAN
Commence par chercher la voie de la sagesse à l’intérieur de toi-même, après tu pourras faire de l’ordre dans ta maison.
MELKI
C’est quoi ce truc tout pourri que tu me dis là ?
FLORIAN
Pour régler sa propre maison, on doit commencer par se perfectionner soi-même. Pour se perfectionner soi-même, on commence par rendre droit son coeur. Pour rendre droit son coeur, on commence par rendre authentique son intention. Pour rendre authentique son intention, on commence par développer sa connaissance et on développe sa connaissance en examinant les choses.
MELKI avale d’un trait son verre et regarde FLORIAN avec des yeux de merlant frit.
MELKI
Ben putain…
FLORIAN
C’est en examinant les choses que la connaissance atteint sa plus grande extension. Une fois étendue la connaissance, l’intention devient authentique; une fois l’intention authentique, le coeur devient droit. C’est en rendant droit le coeur que l’on se perfectionne soi-même. C’est en se perfectionnant soi-même qu’on règle sa maison; c’est en règlant sa maison qu’on ordonne son pays; et c’est lorsque les pays sont ordonnés que la Grande Paix s’accomplit par tout l’univers.