
Et je me suis dit qu’il faudrait se mettre au tir. Aller à la salle de tir et apprendre à tirer. Se préparer. Prendre des cours de close combat, de krav-maga. Il était temps de se préparer. De s’équiper. Et courir en treillis. Et tenir un fusil.
Je me disais ça en roulant ce matin vers Nantes. Et je me suis dit qu’il fallait encourager les jeunes à faire une carrière militaire. Je me disais ça, moi qui m’étais fait réformer, moi qui avait échappé au service militaire. Mieux valait être officier que soldat, avais-je pensé. C’était une pensée amère mais elle m’était dictée par le bon sens. Mieux valait être général que colonel, m’étais-je dit. Etre au plus près de l’information et de la stratégie. Peser dans le game. Nous n’étions certainement pas au bord d’une grande explosion culturelle, avais-je pensé. Nous n’étions vraisemblablement pas en présence d’un grand renouveau artistique, m’étais-je dit.
Voila ce que je me disais, ce matin, en roulant vers Nantes et en écoutant la radio. Je me disais que si les américains n’avaient pas le courage de prendre eux-mêmes les armes pour marcher sur le capitole et se débarrasser de leur tyran grotesque, alors il fallait se tenir prêt à les affronter tôt ou tard. Il finirait par obéir jusqu’au bout à leurs grotesques tyrans, m’étais-je dit. Il fallait écrire « tyrans », au pluriel, m’étais-je dit. Ils étaient plusieurs. Ils étaient une flopée. Il en sortait de partout.
Voila ce que je me disais, en roulant vers Nantes ce matin, dans la beauté des frimas argentins.
Une fois à Nantes, j’avais cessé de penser à cela. Jusqu’au déjeuner, où je m’étais remis à y penser, en discutant avec C. et M. Puis j’avais de nouveau cessé d’y penser pendant l’après-midi et je m’étais remis à y penser ce soir.
De travailler avec les étudiants m’avait changé les idées. Ils sont très gentils, ces étudiants, me suis-je dit. Adorables. Vraiment un bon groupe. C’était un plaisir, vraiment. On était conquis, attendris.
On ne pensait plus du tout à un fusil, un treillis, une grenade, une baïonnette.
On était tout à la joie d’être jeune, insouciant et plein d’enthousiasme.