REPAS FUNÈBRE

C. m’avait réveillé en sursaut au milieu d’un rêve, dans lequel je me trouvais dans une fête du nouvel an, en train de demander à des enfants d’aller voir leurs parents pour leur expliquer que la fête était finie et qu’il était temps de rentrer chez eux.
La fête avait lieu dans le studio et j’étais très déçu parce que, de l’extérieur, on entendait un potin d’enfer là où l’insonorisation aurait dû jouer son rôle.
Heureusement, ce n’était qu’un rêve.
Mais cela veut dire que j’ai été réveillé au milieu d’un cycle de sommeil et ce n’est jamais bon.
Je traînerai cette vieille fatigue toute la journée.
Tant pis pour elle.

Et donc, il faut se préparer pour partir pour Joinville où a lieu le repas funèbre suivant la crémation de Mme P., la maman de C., copine d’enfance de Y.
On y passe l’après-midi.
C. adopte une coccinelle trouvée dans le potager.
On lui crée un lieu de vie, dans un tupperware percé que l’on garnit de pâquerettes, de jeunes pousses de radis et de diverses feuilles. On lui donne quelques grains de sucre dans une goutte d’eau et on se met à la recherche de pucerons, mais nous n’en trouvons pas.

Je ne parle à personne, ou presque.
Je mange, je bois et je médite.
J’écoute les conversations.
Les jeunes, les vieux.
J’entends parler études, travail, politique, vacances, sorties, boîtes de nuit, stages, salaires, loisirs, projets, envies, départs, retours, permis, concours, élections, mariages, naissances, enterrements… Parfois, j’interviens, je feins d’intervenir, j’amorce une intervention, puis je me lève, je vais faire un tour de jardin, respirer du romarin, regarder la forme d’un pignon. Je passe par la cuisine. Je reprends du gâteau, du vin, du café, du champagne, du fromage, de la crème chantilly, des chips, des pistaches, du humous, du taboulé, des piments, de la pitta, de la tarte, de la salade. Je mange trop, je bois trop, je me sens lourd. Je vais me rasseoir, sourire, me taire, fermer les yeux. C. se balance sur la balançoire, saute sur le trampoline.
Je vais sauter sur le trampoline. 
J’arrive à faire quelques saltos avant mais pas les saltos arrière. Ca bloque. 
Je vais me rasseoir.
Conversations. Qui s’éloignent, se rapprochent, s’éloignent.
Ca m’épuise.
Je dors debout.
Je rêve d’une sieste.
Ou d’une balade au soleil au bord de l’eau.
Ou d’une sieste au soleil au bord de l’eau.
Bref.
Vers 17h30, on s’arrache avec C.
RER.
Back home.

Vanné.
Demain, demain, le suspense sera levé.
On saura quoi.